C’est un privilège. Alors, j’entends d’ici les plaintes, les pleurs, les cris au racisme anti-blanc, du fait qu’on veuille retirer la parole de ces pauvres hommes blancs cis et hétéro. Quoi, mais ça reste du racisme vous entends-je dire ?
Bon, pour détendre l’atmosphère, quoi de mieux qu’une petite blague pour entrer en matière. J’en ai une ici d’ailleurs :
“Qu’est ce qui court plus vite qu’un homme hétéro cis blanc avec un téléviseur volé sous le bras ? Son petit frére avec la télécommande”.
Vous ne la connaissez pas ? Ah, pardon, normalement on parle d’une autre minorité. Bon, allez, une autre… Euh… J’en ai une sur les belges, mais ça vise tout de même une un pays comprenant une population aux origines, croyances, couleurs, sexes et genres différents… En réfléchissant aux blagues les plus connues, on constate assez rapidement que les blagues visant les minorités se trouvent à la pelle : les noirs, les arabes, les juifs, les musulmans, les chrétiens, les homosexuels, les lesbiennes, les trans, les femmes…
Par contre, pour trouver des blagues sur les hommes blancs, j’avoue sécher un peu (malgré mon immense répertoire humoristique dont je suis sûr, cher lectorat, que tu n’oserais pas remettre en question). Voyez-vous où je veux en venir ? Non ? Ah, je viens de recevoir un message dans l’oreillette me disant que “on ne peut plus rire de rien, c’est de l’humour il n’y a rien de mal à ça”.
L’homme blanc, intouchable en société ?
Dis comme ça, une bonne blague semble ne pouvoir heurter personne, si ce n’est les personnes manquant “sensiblement d’humour”, n’ayant “aucune autodérision” ou la sale manie de “tout prendre au premier degré”. Par l’humour, on peut néanmoins constater qu’effectivement, ces bonnes blagues, ces petites piques innocentes visent toujours les mêmes catégories de personnes, sans jamais heurter l’homme blanc, cet intouchable. Ce constat peut sembler anodin au premier abord, mais est symptomatique de ce qui est reproché à l’homme blanc cis hétéro : il est LA norme aux yeux de la société. Son comportement, son orientation sexuelle, sa couleur lui valent d’être épargné des différents sujets de raillerie, puisque son statut ou son comportement n’ont pas à être remis en question. Là est l’un de ces privilège.
Une minorité dans la majorité
Car ce n’est pas son seul privilège. Ces derniers temps, la presse ainsi que de nombreuses personnalités du paysage audiovisuel français et mondial ont commenté cette nouvelle “mode” visant à critiquer les privilèges des personnes de sexe masculin, à la peau blanche, se reconnaissant dans leur genre de naissance et attirés sexuellement par le genre opposé.
Pourquoi un tel engouement ? Sur les réseaux sociaux les internautes, concernés, ont sorti les fourches : pourquoi mettre en avant ce segment de la population ? Sont-ils l’origine de tous les maux de la planète ? Doit-on mener tous les hommes blancs au bûcher en leur coupant la langue pour que le monde se porte mieux ? Dans un premier temps, j’aurais envie de dire non (surtout pour la partie “bûcher”, niveau émission de carbone c’est pas très écolo), mais la réponse se révèle être bien plus nuancée que ça.
Lorsque l’on pense discrimination, ce n’est pas à l’homme blanc hétéro et cis que l’on pense en premier. Oui, il existe des agressions commises envers les hommes. Cette catégorie de personne n’est pas épargnée de toutes les violences de ce monde, mais en terme de statistique, il reste la catégorie la moins touchée par ces agressions.
Les facteurs qui font la différence
Il suffit de revenir sur certains facteurs pouvant mener à des discriminations : le genre, la sexualité, la couleur.
Jamais on ne reprochera à un homme blanc hétéro cis d’être de genre masculin, de se reconnaître en tant qu’homme. On ne lui reprochera jamais sa virilité, en disant qu’il exagère, qu’il est maniéré dans l’expression de son genre. Au contraire, trop sérieux, il ne se fera pas traiter de “frigide” ou d’”extrémiste”.
Il connaît beaucoup moins de discrimination à l’embauche qu’une femme, qu’une personne trans ou racisée. Lors d’un entretien, on n’abordera jamais son avenir concernant sa situation familiale, s’il compte avoir des enfants ou non. S’il a des sautes d’humeur, ce ne sera jamais causé par son sexe ou ses hormones, de même que son agressivité ou sa combativité. Ils sont moins touchés par la précarité, les inégalités salariales, ou la discrimination à l’embauche.
Les hommes blancs cis et hétéro ont moins de chances de subir des agressions ou du harcèlement par rapport à leur genre ou leur orientation sexuelle. Ils subissent moins de harcèlement de rue, de harcèlement sexuel au quotidien ou au travail, et sont moins souvent victimes de viols ou de violences conjugales.
Des avantages dans tous les aspects de sa vie
Concernant sa sexualité, il n’a pas à sortir du placard. On ne lui demandera jamais si son hétérosexualité est simplement “une phase”… Que ça va lui passer… Qu’il finira par retrouver le bon chemin. L’hétérosexualité n’est pas considéré comme une maladie ou une déviance. Pas besoin de voir un psychiatre ou un prêtre par rapport à son genre ou sa sexualité. Personne n’a jamais subit de castration chimique, d’enfermement à l’asile ou de suivi psychiatrique pour hétérosexualité.
Il doit beaucoup moins justifier son appartenance à un groupe ethnique, une nationalité ou une religion. L’homme cis subit par ailleurs beaucoup moins de violences verbales ou physiques à ce sujet. Il est moins souvent contrôlé par police, et subit beaucoup plus rarement de violences policières ou de peines de prison ferme.
Le but de cette liste n’est pas de faire culpabiliser cet homme blanc cis et hétéro. Car oui, un grand nombre parmi ce segment de la population s’indigne de voir ce genre de liste être mise en avant, pour des crimes qu’ils n’ont pas (ou ne pensent pas) avoir commis.
Encore une fois, oui, les hommes blancs cis et hétéro peuvent être victimes de violence, d’injustice, d’inégalités. Oui, il y a malheureusement des hommes qui ont subi des viols et/ou des attouchements. Et non, l’objectif n’est pas de dire que tous les hommes sont en tort parce que minoritaires dans ces faits statistiques. Le but, c’est de faire prendre conscience de ces privilèges au quotidien. Que ce qui semble normal pour eux est imposé comme étant la norme dans la société. Ils ne peuvent pas voir le mal dans cette société, puisqu’elle est forgée pour eux et leur confort !
Conclusion
Il me semblait important ce remettre ça au clair, pour en revenir aux débats de fond. Car au quotidien, dans les médias ou au travail, à la tête des entreprises et dans les postes à responsabilités, au gouvernement, dans les films, les séries, parmi les artistes, les politiques, dans quasiment tous les secteurs, ce sont les hommes blancs qui ont la parole, sur tous les sujets. En ayant la parole, ils prennent la majorité de l’attention. Quitte à écraser les débats des autres, de ceux qui avaient pendant un court instant essayé d’attirer l’attention sur eux. Alors oui, nous demandons aux homme blancs cis et hétéro de se taire et d’écouter. Non pas pour toujours, non. Juste le temps de laisser la parole aux personnes concernées. Que ces personnes puissent pour une fois prendre la place et le temps pour s’exprimer.
Mais bon, encore faut-il que l’homme se taise, vous le savez bien. Ce sont les deux erreurs de Dieu lorsqu’il a créé l’homme. D’abord il l’a créé, ensuite il lui a donné la parole…