La psychologue Françoise Susset, présidente de l’Association canadienne des professionnels de la santé transsexuelle répond à 5 questions sur le parcours des personnes transgenres.
Les mots « transsexuel » et « transsexualisme » sont employés, car ce sont ses mots et elle parle en tant que spécialiste donc avec le jargon médical. Françoise Susset est psychologue clinicienne et psychothérapeute conjugale et familiale. Ses principaux champs d’intérêt sont l’intervention auprès de personnes victimes d’abus et de traumatismes ainsi qu’auprès de personnes victimes de discrimination, tout particulièrement des individus provenant des minorités sexuelles.
Dès le début de sa pratique, Françoise a observé que le fait d’appartenir à un groupe minoritaire stigmatisé ajoutait des défis importants pour la santé et la santé mentale d’un individu. En travaillant pour une agence de services sociaux spécialisés dans le soutien et l’intervention auprès des familles les plus démunies du Minnesota, elle a appris à considérer l’impact des forces systémiques destructrices qui agissent sur certains membres de la société et à reconnaître et mobiliser les forces et les capacités de résilience des individus et des familles.
Au Minnesota, elle a fait partie de l’équipe initiale d’intervenants de l’institut Pride, le premier centre de traitement au monde pour les personnes lgbt souffrant d’alcoolisme et de toxicomanie.
Interview publiée sur le site Lapresse.ca.
1 – De quoi s’agit-il ?
Les personnes transsexuelles sentent carrément qu’elles sont nées dans le mauvais corps et qu’elles doivent le modifier pour appartenir à la case qui correspond à leur identité sexuelle.
Pour la majorité des gens, il n’y a aucun conflit entre le sexe biologique et l’identité sexuelle, logée dans le cerveau. On se reconnaît dans son corps d’homme ou de femme, de fille ou de garçon. Pour les personnes transsexuelles, cette identification se fait à l’opposé du corps.
2 – Comment l’expliquer ?
La transsexualité se déclare à un très jeune âge, à partir de 2 ou 3 ans. Mais il se peut qu’on mette 60 ans avant de définir ce malaise. Les recherches penchent vraiment dans le sens d’explications biologiques plutôt que vers des facteurs extérieurs comme l’influence parentale.
3 – Peut-on y changer quelque chose ?
On ne peut pas influencer la transsexualité, pas plus qu’on ne peut influencer l’homosexualité qui émergera à la puberté. Mais on peut réprimer, nier complètement cette possibilité, ce qui créera des effets problématiques. Il est important de respecter l’expression de genre de l’enfant.
4 – Qu’est-ce que la dysphorie du genre ?
C’est la souffrance associée à un corps qui ne correspond pas à l’identité sexuelle. Les études démontrent que les traitements médicaux sont extrêmement efficaces pour la soulager.
5 – S’agit-il d’un trouble de santé mentale ?
Il s’agit d’un problème médical, et non d’un problème mental. Le corps ne correspond pas à la personne. Donc, pour résoudre le problème, on modifie le corps avec des hormones et des opérations. Le traitement n’est pas une psychothérapie.
Les spécialistes remettent sérieusement en question le fait que le trouble de l’identité sexuelle a été inscrit sous la rubrique des maladies mentales dans le DSM (la «bible» des psychiatres américains).
Des problèmes anxieux et dépressifs associés à la dysphorie du genre ou à la transphobie peuvent toutefois apparaître.
Malheureusement, tant que la dysphorie du genre figure dans la rubrique des maladies mentales, les gens s’en servent pour justifier la discrimination envers les personnes transsexuelles et transgenres. Ils se disent: «Ce sont des malades mentaux.»
41% des transgenres ont fait au moins une tentative de suicide.
1,6% dans la population en général.
(Source: National Center for Transgender Equality)
Cela explique pourquoi certains enfants reculent dans leur transition et ne font pas toujours leur “coming out“.